«La pauvreté augmente dans le canton de Fribourg»

Interview de Pascal Bregnard, directeur de Caritas Fribourg

Caritas Fribourg, comme d’autres associations, est de plus en plus sollicitée par des personnes très fragilisée économiquement. Les demandes de consultations sociales comme la fréquentation de l’Épicerie Caritas de Fribourg augmentent fortement. Une deuxième Épicerie Caritas verra le jour en 2024, à Bulle.

On a le sentiment d’une très forte mobilisation du milieu associatif à Fribourg depuis de nombreux mois.

En effet, le milieu associatif est très présent. L’État compte traditionnellement beaucoup sur cet engagement. La précarité augmente dans le canton. Elle reste élevée depuis la crise du covid. Dans son récent rapport sur la pauvreté, le canton parle de 25'000 personnes qui sont à risque de pauvreté. Mais les chiffres datent de 2019. Regardons ce qui se passe sous nos yeux, sur le terrain. Avant le covid, nous suivions chaque année les dossiers de 130 à 150 personnes. En 2023, c’était 280 à 300 dossiers.

Le canton de Fribourg vient de produire son deuxième rapport sur la situation sociale et la pauvreté. Qu’en retirez-vous?

Tout d’abord, le rapport a le grand mérite d’exister. C’est une mise à jour des chiffres. On est d’ailleurs certainement encore en-dessous de la réalité. Nous constatons que le canton réalise la différence entre les statistiques et la réalité concrète. Depuis le covid, le canton a maintenant entendu les appels des milieux associatifs devant l’urgence. Il y a saturation des demandes d’aide. Nous espérons l’introduction d’une politique de prestations complémentaires familles à la vaudoise dès 2025, ce qui doit encore être approuvé par le Grand Conseil. Nous souhaitons également la fin de l’obligation de rembourser l’aide sociale.

L’Épicerie Caritas de Fribourg répond à une forte demande. 2024 verra l’ouverture d’une nouvelle épicerie à Bulle.

L’expérience de Fribourg est en effet très positive. Le bassin de population à Bulle permet cette ouverture d’un nouveau magasin. Nous allons vers de nouveaux partenaires. Mais comme la crise s’est maintenant installée dans la durée, on s’est habitué à la crise. C’est plus compliqué pour les dons. Les donateurs institutionnels sont énormément sollicités. Nous restons confiants, nos donateurs sont généreux.

Comment voyez-vous l’avenir de Caritas Fribourg?

Nous souhaiterions pouvoir répondre à toutes les demandes qui nous sont adressées. Bien que cela soit frustrant, ce n’est pas toujours possible car nos moyens restent insuffisants. Notre objectif n'est pas «plus de Caritas», mais moins de pauvreté. Pour 2024, nous prévoyons notamment un développement de nos consultations dans les différentes régions du canton, ce qui entraîne un budget déficitaire car c'est maintenant que nous devons être présents auprès des personnes fragilisées.

Il ressort du rapport cantonal que plus de 40% des Fribourgeoises et Fribourgeois se sentent seuls. C'est une forme de pauvreté qui nous interpelle et nous espérons créer de nouvelles dynamiques avec notre nouveau service diaconie. En collaboration avec l'Église catholique, ce dernier vise à s'attaquer à cette problématique importante. Cette année, la consultation sociale restera au cœur de notre travail, tout comme le service de désendettement. Bien entendu, l'Épicerie Caritas de Fribourg se révèle très précieuse, et une deuxième ouvrira à Bulle courant 2024. De plus, le programme CarteCulture connaît un développement très significatif et le défi sera de pouvoir absorber cette augmentation.

Informations complémentaires: medias@caritas.ch

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Photo de couverture: © Dominic Wenger