Quand les enfants manquent du strict nécessaire

Pour 5,5% des enfants en Suisse, les activités de loisirs payantes n’entrent pas dans le budget

La pauvreté des enfants est une triste réalité en Suisse. Les chiffres récemment publiés par l'Office fédéral de la statistique montrent ce que la pauvreté signifie pour les conditions de vie des garçons et des filles concernés et dans quels domaines ils manquent du strict nécessaire. 

Un enfant a-t-il des chaussures et des vêtements adéquats, des jouets pour l'intérieur et le plein air, des livres adaptés à son âge, la possibilité d'inviter des amis? Dans son enquête, l'Office fédéral de la statistique a examiné toute une série de domaines de ce type, dans lesquels un manque ou une limitation peut exister. Un enfant peut-il par exemple prendre au moins un repas chaud par jour? Le résultat de l’enquête tient en ces termes: un enfant sur cent doit régulièrement y renoncer parce que ses parents sont confrontés à des difficultés financières.

Seul un petit groupe semble concerné mais l'impression est trompeuse. Les consultations sociales de Caritas montrent bien que, face au renchérissement, de nombreux parents n'ont pas d'autre choix que de se restreindre fortement au moment d’acheter des denrées alimentaires. Une alimentation saine et équilibrée reste souvent un objectif hors de portée. En fait, les parents préfèrent se priver eux-mêmes d'un repas pour pouvoir bien nourrir leurs enfants. Les statistiques ne révèlent donc ici que la pointe de l'iceberg.

Des répercussions négatives pour l’épanouissement et l'intégration sociale

D'autres questions portent sur la capacité d'un enfant à participer à des activités adaptées à son âge et donc à la vie sociale. Pour 2,5% des enfants, même une modeste fête d'anniversaire n'est pas envisageable. Et avec 5,5%, la proportion d'enfants qui ne peuvent pas pratiquer d'activités de loisirs régulières et payantes pour des raisons financières est encore plus de deux fois supérieure.

Adhérer à un club de football, apprendre à jouer d'un instrument ou aller à la piscine avec ses camarades est hors de portée pour ces enfants. Ce ne sont pas leurs intérêts et leurs talents qui déterminent l'organisation de leurs loisirs mais plutôt les possibilités financières de la famille qui limitent fortement le choix de hobbies, d'activités sportives et sociales et donc d'activités communes avec des enfants du même âge. Cette réalité a des répercussions négatives sur l’épanouissement et l'intégration sociale.


Les résultats groupés du module «Privations et santé des enfants» de l'Enquête sur les revenus et les conditions de vie (SILC) de l'Office fédéral de la statistique (OFS) font dresser l'oreille. Au total, 6,4% des enfants de moins de 16 ans sont considérés comme subissant des privations. Les statistiques parlent de privation lorsque l'on constate une forte restriction dans au moins trois des 17 domaines importants pour les enfants. Pour près d'un quart de ces derniers (23,4%), c'est le cas dans au moins un des 17 domaines. Au vu des restrictions drastiques liées à chacun des thèmes sous enquête, cela doit donner à réfléchir.

Les enfants étrangers particulièrement touchés

L'enquête révèle également que les enfants sont plus ou moins vulnérables selon leur situation. Les enfants étrangers manquent plus souvent de choses élémentaires: ils sont presque deux fois plus touchés par les privations que les enfants ayant un passeport suisse. L'enquête fournit aussi des indications claires sur le fait que les enfants dont les parents n'ont pas de formation professionnelle sont nettement plus limités que la moyenne. 15% des enfants vivant dans un foyer monoparental subissent des privations dans trois domaines, et même la moitié des enfants dans ces foyers doivent vivre avec des restrictions dans au moins un domaine.

Les enfants sont plus souvent confrontés à des privations que les adultes. C'est tragique, car toutes les études sur le sujet montrent sans ambiguïté que les premières années de vie sont tout à fait décisives pour l’épanouissement, pour les chances de formation et donc pour la perspective de pouvoir mener plus tard une vie exempte de pauvreté. Les mesures visant à soutenir les familles en situation de pauvreté ou menacées de l’être sont donc cruciales d’un point de vue sociétal.

Les pistes politiques permettant d’aller à l’encontre d’une telle évolution sont connues. Caritas Suisse demande notamment l'introduction à l'échelle nationale de prestations complémentaires pour familles, un accueil extrafamilial abordable pour toutes et tous ainsi qu'une extension de la réduction individuelle des primes pour la caisse maladie.

Écrit par Stefan Gribi, responsable Communication politique, Caritas Suisse

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Photo de couverture: © Thomas Plain