La coopération au développement sous forte pression
La question qui a occupé le Parlement durant la session d'automne était de savoir si on doit financer l'augmentation du budget de l'armée sur le dos des habitant-e-s les plus pauvres de l’hémisphère sud. Le débat a montré que la coopération au développement est fortement mise sous pression, même si de nombreux parlementaires la défendent avec véhémence. La décision définitive ne tombera toutefois que durant la session d’hiver.
Au début de la session d'automne, le Conseil des États a approuvé la proposition du Conseil fédéral relative à la stratégie de coopération internationale (CI) 2025-2028. La Chambre haute est donc favorable à l’idée de financer entièrement l'aide à l'Ukraine avec le budget de la CI pour les quatre prochaines années. Comme le budget global ne sera pas augmenté, cela implique une réduction sensible des fonds alloués aux pays les plus pauvres du monde. Avec le cadre financier proposé, la Suisse ne va de loin pas atteindre d’ici 2028 l'objectif convenu sur le plan international en matière de financement du développement. Comme les chiffres de la pauvreté, de la famine et des crises qu’elles recouvrent ne cessent d’augmenter, Caritas Suisse avait demandé que le financement de l'aide à l'Ukraine ne se fasse pas au détriment de la lutte contre la pauvreté dans l’hémisphère sud. Les hausses qu’elle a réclamées n'ont pas trouvé grâce au Conseil des États.
La CI malmenée dans les débats sur le plan d’austérité
Mais en même temps, toutes les propositions de réduction du budget de la CI ont aussi été rejetées. Au Conseil des États, beaucoup de parlementaires ont relevé l'importance d'un engagement fort de la Suisse dans la lutte contre la pauvreté dans le monde. Une proposition visant à réhausser le budget de l'armée au détriment de la CI a été très nettement balayée. C’est d'autant plus réjouissant qu'en mai, le Conseil des États était encore favorable à cette idée lors de la délibération sur le budget de l'armée.
Cette même proposition que plusieurs membres du Conseil des États ont entre-temps qualifiée de «coup bas» a par contre passé la rampe au Conseil national durant la deuxième semaine de la session d'automne. Favorable à un relèvement massif du budget de l'armée, la Chambre basse veut déjà le réaliser d'ici 2030. Elle se rallie sur ce point au Conseil des États, contre l’avis du Conseil fédéral. Afin de pouvoir maintenir le frein à l'endettement malgré cette énorme hausse des dépenses, elle cherche des possibilités d'économies dans d'autres domaines. Une majorité du Conseil national estime que c’est notamment dans le domaine de la CI qu’il faut réaliser des économies. Le paquet d'allègement budgétaire que le Conseil fédéral a adopté sur la base du rapport du groupe d'experts Gaillard prévoit malheureusement aussi des coupes dans la CI. Pour Caritas, la poursuite d'un engagement fort de la Suisse dans la lutte contre la pauvreté est clairement remise en cause.
La solidarité est plus que jamais de mise
Les décisions prises ces dernières semaines au sujet du financement de la CI sont donc contradictoires et confuses. On verra pendant la session d'hiver si le Parlement veut réellement mettre en jeu la tradition humanitaire. Avec Alliance Sud et d'autres organisations actives dans la politique de développement, Caritas Suisse a lancé un cri d’alarme contre un coup de canif dans la coopération au développement. Nous nous opposons avec détermination aux économies que la Suisse compte réaliser sur le dos des plus pauvres et des plus vulnérables dans l’hémisphère sud.
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Photo de couverture: Enfants au Cambodge qui reçoivent un soutien grâce à la coopération internationale. © Nicolas Honoré