La croissance économique du Cambodge s’élève à 7% par an. La classe moyenne se développe et les choses vont plutôt bien pour le pays. Mais tous ne profitent pas de ces progrès.
Les périodes de sécheresse, le surendettement et la pauvreté poussent de plus en plus d’habitants des régions rurales — qui forment l’immense majorité des Cambodgiennes et Cambodgiens — vers les métropoles dans l’espoir de trouver un emploi. Mais dans les villes, il n’y a pas de travail pour les personnes peu qualifiées venant des campagnes. La seule issue semble être un emploi à l’étranger, avec l’espoir de percevoir des salaires plus élevés. Entre 1 et 2 millions de Cambodgiens travaillent actuellement en Thaïlande. Moins de 10% ont suivi la voie légale. Les autres ont suivi des trafiquants ou des agences étrangères. Ces migrants illégaux se retrouvent privés de droits, exposés aux caprices de leur patron ou des autorités.
La situation est préoccupante au Cambodge. C’est ce que montrent les études globales dont les résultats paraissent chaque année. À l’indice de l’esclavage, le Cambodge fait partie du top 10. C’est l’un des pays où il est le plus facile d’exploiter les personnes. Le manque de perspectives et la pauvreté rendent les gens particulièrement vulnérables et obligent de nombreuses familles à prendre des décisions et à choisir des modes de vie difficiles. La pauvreté, le désespoir, l’accumulation de dettes et l’espoir d’une vie meilleure sont le terreau idéal pour la traite et l’exploitation des êtres humains, surtout lorsque le système juridique est faible. Le Cambodge est également en tête de l’indice de la traite des êtres humains. Et cela concerne tout particulièrement les enfants. La part nationale du travail des enfants de moins de 14 ans est actuellement de 36 %, les jeunes représentant un peu moins de 50 % de la population totale.
Dans la ville du projet, Poipet, la participation des mineurs à la vie économique est beaucoup plus importante encore. Poipet se situe dans la province de Banteay Meanchey, dans le nord-ouest du Cambodge, et c’est le principal point de passage vers la Thaïlande voisine. Cité de 500 000 âmes, elle attire chaque année des milliers de particuliers et de familles espérant une vie meilleure. Les gens quittent leurs villages pensant trouver un travail bien rémunéré ici ou en Thaïlande. La réalité est tout autre : ils finissent comme hommes de main, porteurs ou collecteurs de déchets et sont logés dans des cabanes louées à prix fort dans l’un ou l’autre des bidonvilles en expansion. Les familles sont confrontées à des problèmes comme l’exploitation économique et sexuelle, la traite des êtres humains et la violence domestique. Les enfants et adolescents, qui sont les plus vulnérables, sont particulièrement exposés à ces mécanismes d’exploitation. Par manque d’éducation, d’information et d’alternatives, ils sont exploités de multiples manières ou tombent dans les griffes des trafiquants d’enfants.
De plus, les familles de Poipet sont souvent des rapatriés involontaires qui ont été renvoyés par les autorités thaïlandaises — des centaines chaque mois, dont 10% d’enfants. Il s’agit souvent d’enfants séparés de leurs parents, et victimes de la traite des êtres humains. Les regroupements familiaux sont compliqués, il est difficile de localiser les familles. Souvent, les enfants sont trop jeunes et ne peuvent pas donner de renseignements fiables. Il faut trouver pour ces enfants des solutions adéquates.